
La semaine dernière, vous avez peut-être remarqué de drôles de silhouettes arpentant les rues de Paris. Fashion Week oblige, les plus beaux looks du monde se réunissaient dans la capitale pour assister aux différents défilés annonçant les tendances futures. Mais les musées ont aussi leur épingle à tirer du jeu, c’est ce que nous a démontré le musée du Quai Branly – Jacques Chirac avec un « Week-end Fashion Week » pour partir à la découverte de sa collection de textiles mais aussi découvrir des mouvements culturels qui nous sont contemporains comme le wax ou le voguing.
Un week-end d’ateliers
Ce qui a fait venir tout Paris furent ces ateliers portés sur le wax. Le but était de partir à la découverte de ce tissus devenu emblème de la mode africaine, comprendre son histoire et le manipuler. Il fallait attendre longtemps avant de pouvoir avoir une place dans l’atelier « wax mania ». Celui-ci comportait une première partie consacrée à l’histoire, comment un tissu colonial hollandais destiné à l’île de Java a-t-il bien pu se répandre sur un continent autre que ces deux premiers. Ensuite suivait le côté manuel où les participants fabriquaient une pochette, un bijou ou un serre-tête. Une manière d’allier histoire et approche du textile au plus près de la création.
Un autre atelier autour du wax était réalisé par Pallaya, dont la profession est la fabrication de foulards et l’enseignement du nouage. Trois manières de nouer ces tissus autour de ses cheveux sont apprises, techniques à la fois simples et complexes. Des échanges nourris par des anecdotes et histoires de traditions, un moment convivial assis en cercle sur des coussin où chacun se repose et prend du plaisir.
En plus du wax, le voguing était mis à l’honneur avec des ateliers pour apprendre cette danse issue de la contre-culture. Une manière ludique et ouverte d’accéder à ce milieu très peu connu. Animés par des professionnels et passionnés, l’approche se faisait dans une joie partagée et dans un bonheur de transmission et d’apprentissage.
Un week-end de shows
Le « runway »peut être lié au voguing et fut la dernière découverte proposée par ce week-end. Ce show de fin de dimanche a accueilli plus d’une centaine de visiteurs, habitués ou non de ces pratiques. Quelques performers de la Paris Ballroom Scene étaient vêtus de leurs propres créations et ont défilé au son de musiques électroniques, arborant fièrement leurs atours. Assister à un tel évènement permet de mieux se rendre compte de ce qui anime cette communauté de passionnés et les finitions de leurs tenues montrent le soin qu’ils y apportent. Une ambiance de compétition pouvait être présenté lors de l’élection du « roi du musée » mais le tout fut dans une bonne ambiance sérieuse mais pas trop. Une interaction avec le public, aussi timide qu’impressionné, permettait une approche directe et un contact chaleureux. Un week-end sous le soleil de découvertes de tendances actuelles et souvent inconnues du grand public. Le musée était devenu une vitrine de performances vivantes.
Un week-end de visites
Mais le musée du Quai Branly – Jacques Chirac gardait son côté muséal avec une découverte plus approfondie des collections textiles et des bijoux.
Les conteurs sont monnaie courante dans ce lieu et étaient de nouveau sur le plateau des collections pour raconter aux visiteurs curieux venus pour ce week-end ou non des légendes asiatiques, africaines, américaines ou océaniennes. Des rois, des astres, des héros se mélangeaient pour former des histoires plus ou moins heureuses mais remplies d’aventures. Souvent, les thématiques de l’or, l’argent et la nacre sont abordées car les parures exposées sont principalement en ces matières. Ce genre d’événement est associé à tord au monde des enfants. Ils étaient plutôt peu face au nombre d’adultes absorbés par les voix douces racontant ces contes venus d’ailleurs.
Le côté plus scientifique était assuré par Clothilde Castelli, restauratrice au sein du musée. Les objets derrière les vitrines prenaient une autre teinte avec un accent mis sur la conservation et les problèmes d’insecte. Pourquoi un objet textile est mis sous vitrine et non à l’air libre ? Pourquoi y-a-t-il si peu de lumière ? Elle était présente pour rependre à toutes les interrogations et expliquer aussi ce qui se cache derrière le tissus. En effet, des doublures en soie et teinture neutres sont nécessaires pour consolider le vêtement et le réparer parfois et ce, de manière la plus invisible possible. Des échantillons circulent, le toucher entre en scène. C’est un travail de fourmis qui est expliqué, des heures passées pour analyser la composition du tissus puis une journée pour retrouver une nuance de teinte exacte et ensuite une longue période de travail lent et fastidieux pour faire les « opérations chirurgicales ». Ce métier est souvent oublié et pourtant est nécessaire avant toute exposition. C’est à la fois un travail de chimiste physicien mais aussi de couturière le tout englobé dans le passion des cultures extra-européennes.
Ces cultures étaient mises à l’honneur dans une autre visite explicitement nommée « la mode exposée ». Les coutumes et traditions des pays liées à leurs vêtements étaient expliquées. Les vêtements exposés au sein des collections sont des vêtements d’apparat et liés à la thématique anthropologique des rites de passage. C’est le cas de jupes de la province de Guizhou en Chine qui étaient portées par les jeunes filles à marier. Elles étaient réalisées à la main depuis leur plus jeune âge et reflétaient leur statut social par les ornements mais aussi par la qualité des tissus tout en suivant les modes. Aujourd’hui, ces traditions existent toujours mais ces jupes sont achetées par correspondance et les catalogues avec les prix font office de cotation. Ces visites n’englobaient pas tous les vêtements présents et le dimanche, Daria Cevoli présentait les costumes du nord de l’Asie lors d’une conférence.
C’est donc un week-end complet et présentant une multitude de lieux, de cultures et de pratiques que le musée du Quai Branly – Jacques Chirac proposait. Les événements sur le wax et le voguing ont été ceux déclencheurs pour la venue des nombreuses personnes qui faisaient alors leurs premiers pas au musée. Pour les activités au sein des collections, les visiteurs étaient surtout des curieux de passage ou des habitués des lieux. Ce sont donc deux mondes différents qui se côtoyaient au même moment dans un même espace conférant encore une fois raison au dicton du musée du Quai Branly – Jacques Chirac : « Là où dialoguent les cultures ».