
Vous – êtes vous déjà aventurés dans les catacombes de Paris ?
Ouverts au public depuis 1809 ce lieu insolite vous invite de plonger littéralement dans les entrailles de la capitale pour y découvrir une part cachée de son histoire. Mais avant toute chose, « les catacombes » qu’est-ce que c’est ? C’est un lieu souterrain utilisé pour inhumer les défunts, les plus connus sont ceux de Rome car c’est en ces lieux que les premiers chrétiens se réunissaient et que s’est développé le premier art chrétien.
Les catacombes de Paris s’étalent sur 300 km de boyaux souterrains dont 1.5 km est ouverte au public. Ce n’est qu’une infime partie de l’ensemble des galeries souterraines de Paris s’étendent sur plusieurs arrondissements de la capitale. Pour accéder à ce lieu unique il faut s’enfoncer à 20 mètres de profondeur.
En vérité les catacombes de Paris ne sont pas « vrais » catacombes. Il s’agit plus précisément d’un ossuaire aménagé à la fin du XVIIIe siècle pour désengorger les cimetières à ciel ouvert de la capitale. Cet ossuaire municipal prend place au sein des anciennes carrières souterraines s’étendent sous plusieurs arrondissements parisiens, sous la plaine Montsouris.
Beaucoup de légendes circulaient et circulent toujours concernant ces lieux. Pour ceux qui ne souhaitent pas s’y aventurer il en existe des images. Si aujourd’hui le flash nous permet de photographier en toutes circonstances, ce n’était si évident au XIXe siècle, nous allons voir comment Nadar, un photographe à succès de l’époque, a réussi à relever le défi.
La petite histoire des catacombes de Paris
Il faut se remettre dans le contexte du Paris de la fin du XVIIIe siècle où des événements viennent semer la panique dans l’actuel XIVe arrondissement : l’engloutissement d’une maison rue d’Enfer (actuelle avenue Denfert-Rochereau) à 28 mètres sous le niveau de la cour, en décembre 1774. Faisant naître la crainte chez un certain nombre de parisiens de voir, eux aussi, leur maison s’effondrer. Ces mystérieux effondrements avaient une raison simple : le sous sol de la capitale ressemblait à un véritable gruyère, un gigantesque dédale de carrières d’où provenaient les pierres nécessaires à la construction de Paris. Il fallait agir sans attendre, le Conseil d’Etat créa l’Administration Générale des Carrières le 4 avril 1777. Charles-Axel Guillemot Inspecteur Général de cette administration entreprit la reconnaissance de ce formidable réseau dont une grande partie était alors inconnue. Ce travail bouscula les habitudes des voleurs, mendiants et autres personnages troubles qui peuplaient les carrières depuis des siècles.

En plus de ces problèmes d’effondrements, la capitale était confrontée à une seconde grande problématique. Les cimetières étaient saturés de cadavres, le cas le plus éloquent était celui du cimetière des Innocents. Les riverains se plaignaient de l’odeur de ce charnier produite par l’accumulation de corps en décomposition. Un ouvrage de 1862 décrit la situation des riverains de ce cimetière début 1780 : « L’eau des puits se saturait d’une sorte de purin d’origine humaine, l’air était souillé de cet odeur douceâtre et révoltante ». La ville était confrontée à un immense problème de santé publique. Pour renverser la situation il n’y avait d’autre solution que la suppression et l’évacuation de ce cimetière. Les autorités parisiennes entreprennent d’utiliser les anciennes carrières de la plaine Montsouris pour entreposer les ossements. Une idée certes logique mais qui posait des problèmes insolubles au Conseil d’État et à l’Église : comment procéder à l’exhumation de plusieurs milliers de cadavres, les transporter et les entreposer en suivant des critères conformes à la religion. L’inauguration de l’ossuaire a lieu le 7 avril 1786. Très vite on exigea une action similaire pour un certain nombre de cimetières. Un ossuaire général municipal fut créé prenant à ce moment le nom abusif catacombes.

Avant son ouverture au public, en 1809, les catacombes ont fait l’objet d’un aménagement décoratif conséquent : les ossements laissés en vrac sont soigneusement organisés en rangées de tibias alternent avec des crânes tandis que derrière les parements s’entassent les os restants. Des monuments maçonnés de style antique et égyptien sont également aménagés dans le parcours, au forme de piliers doriques ou de tombeaux.
Les catacombes ouvert au public rencontrèrent rapidement un grand succès. Les visites restaient rares, on y venait par petits groupes, il s’agissait d’un véritable divertissement mondain (les escape games d’autrefois…)
Un lieu qui rassemble des curieux

En 1861 la photographie s’invite 20m sous terre. Gaspard Félix Tournachon mieux connu sous le pseudonyme de Nadar est né à Paris en 1820. D’abord journaliste caricaturiste, il se lance dans la photographie et dès 1854 il est un portraitiste à succès passionné d’aéronautique. Il prend la première photographie aérienne en 1858. Il met au point un système d’éclairage électrique lui permettant de photographier de nuit.
Après avoir survolé Paris, Nadar descend dans les catacombes à la recherche de points de vues inédits. À cette date, il n’est pas possible de réaliser des vues satisfaisantes sans lumière naturelle car les substances n’étaient pas assez sensibles à la lumière. Tout ce qui n’était pas assez éclairé était des sujets exclu d’emblée, rendant impossible la photographie de nuit ou le mouvement jusqu’à l’invention du gélatino bromure d’argent.
Nadar utilise le procédé au collodion humide sur plaque de verre accompagné de son système d‘éclairage artificiel. Il fonctionne grâce à la poudre de magnésium et est alimenté par une batterie de cinquante piles. Le magnésium brûle en produisant une luminosité très forte et en dégageant une intense fumée, rendant la photographie dans les catacombes possible. Le temps de pose nécessite entre 1 à 2 minutes dans les meilleurs cas mais il peut aller jusqu’à 15 minutes. Il est donc impossible de saisir un ouvrier qui travaille, ainsi pour donner l’échelle Nadar utilise des mannequins habillés en ouvriers, accompagnés de leurs outils et wagonnets d’ossements.
Il expérimente pendant 3 mois les prises de vues à la lumière artificielle.
« Arrête c’est ici l’empire de la mort » 
Il s’agit d’un alexandrin inscrit sur une plaque que l’on peut voir dans la partie visitable des catacombes, mais la vie a aussi ses droits. Si la plupart des puits d’accès sont illégaux et ou fermés, il existe des amoureux du lieu qui y descendent fréquemment, ils viennent y chercher aventure, frisson, calme, connaissance géologique, histoire de Paris. De nos jours on appelle ces explorateurs urbains urbexer, en référence au terme « urbex » (urban exploration), qui désigne le fait visiter des lieux construits par l’homme, abandonnés, en général interdits, cachés ou difficile d’accès.
Fanny de l’Archéoclub de l’Ecole du Louvre.
Urbexers pour désigner les explorateurs clandestins des sous-sols parisiens ? Non, tout simplement des cataphiles. En revanche, pour info, ceux qui vont sur les toits sont appelés des stégophiles et non toiturophiles par manque de vocabulaire…
Sincèrement !
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L’article ouvrait sur « l’urbex » pour montrer que le gout de l’exploration des villes, de nos jours, ne se limite plus uniquement aux sous-sol : elle peut prendre de multiples formes et est le plus souvent filmée plus que photographiée. Bien à vous
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