
« Nouvelle année, nouveaux concepts » a dû être une des résolutions prises par le Musée du Louvre en 2019 car une nouvelle nocturne s’invite chaque premier samedi du mois. Elle se veut exceptionnelle mais surtout gratuite et ouverte à tous. Le musée entier est ouvert gratuitement, mais attendez-vous à faire une très longue queue car l’affluence est grande : seule une aile est « privatisée » et propose des activités comme des concerts, des jeux ou des visites commentées. Pour accéder à cet endroit privilégié, vous avez surement dû réserver vos précieux sésames lors de l’ouverture en ligne de la billetterie spéciale hier. Si vous avez loupé ce rendez-vous, il ne vous reste plus qu’à patienter jusqu’à fin mars afin en attraper un pour la Nocturne d’avril. Mais, qu’importe votre situation actuelle, retour sur celle du 2 février qui, peut-être, vous donnera envie de voir le Louvre sous une autre nuit.
L’accueil
Armés de beaux sourires et de tote-bags spécial Nocturne du Samedi, les agents du musée vous accueillent et vous livrent toutes les informations. Rendez-vous à l’accueil des groupes avec votre billet, suivez la file, faites-le valider et recevez un super bracelet qui vous permettra de vagabonder où bon vous semble toute la soirée. Ensuite, vous êtes amenés dans un des grands espaces du service où un plan avec les horaires des activités vous est donné avec de nombreuses explications.
Beaucoup d’attention est portée aux enfants et familles, avec des jeux qui leur sont notamment adaptés. Tout au long du parcours, des médiateurs de l’Ecole du Louvre sont là pour encadrer ces jeux qui sont, par exemple, dessiner une oeuvre ou un puzzle géant. L’offre est spécialement conçue pour les enfants tandis que les parents peuvent écouter les propos scientifiques et artistiques sur les œuvres exposées. Des cartes postales représentant des détails d’oeuvres sont aussi distribuées, le but étant de retrouver d’où ils peuvent venir. Activité fort appréciée des familles qui peuvent la faire à leur rythme sans l’intermédiaire de médiateurs. Un rituel semble être de faire une photo de leur enfant devant la peinture retrouvée, carte en main, et parfois disant « il faudra que tu le montres à la maîtresse lundi ». Cette notion du souvenir de l’expérience est aussi présente par de nombreux stands photos où, en passant la tête dans des reproductions d’art, le visiteur devient aussi une pièce de musée unique.
Des concerts…
Après ces quelques temps de présentation et d’adaptation à cette ambiance nouvelle, focalisons-nous sur la programmation musicale de ce 2 février. En effet, chaque nocturne est unique par ce biais et pour ce volet étaient présents, dans la cour Puget, cinq musiciens de l’Orchestre de Paris, interprétant des œuvres classiques et mouvementées des répertoires de Bartók, Bregovic ou encore Brahms. Au violon, Anne-Sophie Le Rol, qui fréquente cet orchestre depuis ses 21 ans mais qui prend part à de nombreux projets qui la font jouer dans le monde entier. C’est à Douai que Stanislas Kuchinski commence à étudier le piano puis il apprendra la contrebasse lors de son entrée au CNSM de Paris à l’âge de 16 ans. Cependant, il a plus cordes à son arc(het), jouant aussi à l’Opéra de Paris mais étant surtout professeur dans des conservatoires. A la clarinette, Olivier Derbesse. Il débute cet instrument à 10 ans au Conservatoire de Roubaix et c’est en 2001 qui entre dans cet orchestre comme petite clarinette solo. Mais, il a aussi d’autres projets comme le trio « Les flamants noirs ». Le tromboniste de la soirée, Nicolas Drabik, a aussi passé quelques temps dans les Hauts-de-France, plus précisément au conservatoire de Valenciennes. Depuis 2002, il est membre de cet orchestre et jongle aussi avec une volonté d’enseigner et de transmettre sa passion. Le dernier musicien de ce quatuor est le jeune Emmanuel Hollebeke aux percussions. Membre de l’orchestre depuis 2012, il est habitué de ces formations comme sa présence au sein de l’Orchestre Philharmonique de Radio France.
Valentin Tournet était seul dans la Galerie Médicis pour déployer son répertoire des XVIIe et XVIIIe siècle. Jeune prodige de la viole de gambe, il commence à étudier cet instrument à l’âge de 5 ans. Il commence à se produire à 13 ans, parcourant les plus prestigieuses salles d’Europe. C’est naturellement au Musée du Louvre, dans l’acoustique de cette grande salle, qu’il s’exprime à travers sa viole de gambe et sa lyra-viol, (instrument d’ailleurs représenté dans les peintures siégeant à proximité). Avant toute chose, une explication est nécessaire face à ces instruments peu communs aujourd’hui. Pour une mise en contexte, Dominique de Font-Réaulx était présente et a permis par ses propos, comme un hors-d’oeuvre, de s’imprégner d’un autre siècle.
…et des savoirs
Une des caractéristiques propres d’un musée est d’avoir des œuvres mais celles-ci renferment de nombreux secrets. Pour les découvrir, des élèves de l’Ecole du Louvre sont présents. Un des moments marquants est la découverte du palais de Khorsabad du département des antiquités Proche-Orientales à la lumière d’une lampe-torche. Une redécouverte de cette civilisation par le biais de l’iconographie. Des mots parfois ardus sont expliqués et le faisceau de lumière permet de mieux capter les petits indices sans que l’oeil ne se perde. Même chose dans les Appartements Napoléon III où de nombreuses personnes écoutent attentivement les médiateurs. Devant le trône de Napoléon Ier, en fin de parcours, Julien, étudiant en deuxième année. C’est sa seconde participation aux Nocturnes du Samedi en tant que médiateur et il a eu envie de participer car « [il] aime être au contact des gens. […] Vraiment le contact avec des gens qui sont à fond alors qu’ils sont peu habitués aux musées. » Ce soir-là, il présentait ce trône et ce choix est dû à la passion qu’il a pour l’Empereur. Pour clore ce parcours très impérial, la conservatrice Néguine Mathieux expliquait de fond en combles l’escalier Lefuel. Une professionnelle du musée au plus près des visiteurs, une manière de faire tomber la barrière entre les acteurs de l’ombre et ces personnes venant voir le fruit de leur travail.
Verdict ?
Un évènement à faire au moins une fois dans sa vie pour la richesse et la qualité du contenu proposé. Des étudiants motivés décryptent les œuvres principales tandis que des musiciens donnent de la vie dans ces salles si silencieuses habituellement. Le personnel est souriant, le partage de savoir avec des conservateurs est un réel privilège. Cette soirée est donc un lieu de passion, elle est autant présente dans les yeux que dans les cœurs mais elle est surtout partagée. Ce moment exceptionnel est un cadeau que le musée peut faire à ses arpenteurs en ce début 2019 !