
Terrifiants pour certains, séduisants pour d’autres, en un siècle les vampires ont su s’imposer sur le devant de la scène culturelle, et sont devenus un incontournable de la saison d’Halloween.
D’où vient leur légende ? Pourquoi nous fascinent-ils ? Comment la littérature s’est-elle emparée de leur mythe et le cinéma de leur image ?
Pour le découvrir, rendez-vous à la cinémathèque française à l’occasion de l’exposition «Vampires, de Dracula à Buffy», révélant tous les secrets des célèbres suceurs de sang, de Bram Stoker à Coppola en passant par Nosferatu et Twilight.
Les origines
Issus de la mythologie grecque et mésopotamienne, les vampires sont d’abord associés à des démons femelles suçant le sang des nouveau-nés, à l’image de Lilith ou des stryges grecques. Ils s’enracinent ensuite en Europe centrale au Moyen Âge, où le mot « vampyri » apparaît pour la première fois : il désigne des morts-vivants qui, selon la légende populaire, déterreraient les cadavres des cimetières et se nourriraient de sang humain. Enfin, au XIXe siècle, animé par sa passion pour l’occultisme et inspiré des légendes slaves, Bram Stoker invente le célèbre comte Dracula. L’exposition propose de retracer cette création littéraire à travers des documents inédits : ouvrages pionniers évoquant la figure du vampire, essais scientifiques, ébauches de Bram Stoker, vieilles éditions de Dracula et carte parcourant les hauts lieux du mythe en Europe centrale.
Premiers vampires du cinéma
L’aube du XXe siècle inaugure presque simultanément la naissance des vampires avec celle du cinéma. Dès ses débuts, le septième art s’empare de l’engouement littéraire autour de ces créatures immortelles. Cette appropriation passe d’abord par la figure de la « vamp » : une métaphore désignant une femme fatale séduisant les hommes pour profiter de leurs biens, et les abandonnant après avoir ruiné leur existence. La première vamp est incarnée par Theda Bara dans Embrasse-moi, idiot de Franck Powell en 1915. Cependant, Theda Bara est une vampiresse au sens figuré. Il faut attendre 1922 pour voir l’apparition du premier véritable vampire : Nosferatu. Réalisé par Murnau, le film s’inspire fortement de l’histoire de Dracula tout en changeant les noms propres, faute de posséder les droits d’auteurs. Dans son œuvre, Murnau fait du vampire une créature monstrueuse dotée de mains et de dents surdimensionnées, au physique terrifiant et inhumain.

Dracula et le septième art
« Je suis Dracula » : voilà la phrase culte choisie pour ouvrir cette exposition, en hommage au plus célèbre vampire de l’histoire. Immédiatement, nous sommes replongés dans l’univers du comte transylvanien, de l’élégant noir et blanc de Tod Browning (Dracula, 1931), à la flamboyance baroque de Coppola (Dracula, 1992). Une multitude de témoignages sont rassemblés pour le plus grand plaisir des fans, avec au programme vieilles affiches de films, costumes connus de tous et extraits de scènes audacieusement montés en parallèle.

En effet, ces extraits font ressortir la manière dont les réalisateurs dépeignent Dracula au fil des décennies, entre inventivité et respect de l’œuvre littéraire. De plus, des séries de gravures, photographies et peintures en tout genre contribuent à nous immerger dans l’ambiance mystérieuse de Dracula.

Les années 1990 : le vampire magnifié
Avec les romans d’Anne Rice l’image du vampire connait un tournant : il n’est désormais plus question d’une créature lointaine, moyenâgeuse et incomprise mais d’un être séduisant, tourmenté, passionné et parfois plus vivant que les vivants eux-mêmes. Le célèbre Entretien avec un vampire de l’auteure est adapté en 1994 au cinéma par Neil Jordan, rendant ainsi populaire cette nouvelle représentation. Dans les années 2000, c’est au tour du petit écran de s’emparer du mythe avec la série Buffy contre les Vampires, dans laquelle une jeune adolescente est partagée entre sa destinée de tueuse de vampire, et son attirance pour certains d’entre eux. Enfin, la sortie du premier chapitre de Twilight en 2008 marque la consécration : véritable succès, le film fait du vampire un éternel adolescent, victime d’un amour impossible avec une mortelle.

Une muséographie et un contenu inédits
L’un des points forts de cette exposition est la diversité des médiums qu’elle invoque et la manière dont elle les met en scène. Dès l’entrée, la scénographie nous met dans une ambiance «château de Dracula», entre atmosphère sombre, jeux de lumière, éclairage à la bougie et vitrines en forme de cercueils : effet Halloween garanti! L’exposition évoque tous les arts (peinture, mode, photographie, dessin, gravure, littérature, BD…) pour donner l’idée la plus complète de l’influence qu’ont eu les vampires dans nos sociétés. Cinémathèque oblige, le cinéma est mis à l’honneur avec des objets inédits permettant d’entrer dans les coulisses des films (éléments de décor, costumes, affiches, projets publicitaires, storyboard…). De plus, l’ensemble est intelligemment mise en scène dans un parcours thématique pleins de surprises, abordant le vampire sous tous ses aspects : politique, poétique, érotique et même international! Enfin, de nombreuses projections et événements sont proposés pour prolonger l’exposition, avec une journée spéciale Halloween le 31 octobre, consacrée au célèbre Tim Burton.

C’est donc un rendez-vous à ne pas manquer pour celles et ceux qui désirent frissonner à Halloween, et jusqu’au 19 janvier 2020.
Roxanne Haessig
Ci-dessous, le lien contenant toutes les informations de l’exposition et le calendrier des projections : https://www.cinematheque.fr/cycle/vampires-527.html
Image de couverture : Christopher Lee interprétant Vlad Tepes dans « Le Cauchemar de Dracula » (Terence Fisher, 1958)