À la rencontre de l’illustratrice Lanuitremueparis et des femmes de 2020

Sous le pseudonyme Lanuitremueparis, Blanche illustre son quotidien et l’actualité française depuis plus de trois ans. Son contenu s’est fait de plus en plus militant et c’est dans le prolongement de ce militantisme qu’a lieu du 5 au 14 mars, une exposition à la Sister’s Factory sur le thème des femmes en 2020. A quelques jours du vernissage, nous vous proposons d’en apprendre un peu plus sur la jeune artiste.

Est-ce que tu pourrais nous parler un peu plus de ton exposition à venir ?

Il faut d’abord parler du lieu, la Sister’s Factory, qui m’a proposé spontanément d’exposer, c’est un restaurant -bar géré par une femme qui fait partie de l’association « les nanas de Paname », qui vise à promouvoir les femmes dans différents corps de métier où elles sont représentées. Par exemple, elle est l’architecte de l’association. Du coup le lieu s’appelle la Sister’s factory, pour fabriquer de la sororité, ce qui colle bien avec mes illustrations. On a essayé d’axer l’exposition sur la sororité et les femmes dans la modernité. On entre dans une nouvelle décennie, c’est les nouvelles années 20, donc on s’est posé la question de ce qu’étaient les femmes en 2020.

Ce qui m’a marqué cet automne c’est de faire partie du collectif des colleuses, Collages Féminicides Paris. Pour moi elles et tout le militantisme qui s’est créé autour est super représentatif de la nouvelle vague des féministes, qui est née de #Metoo mais qui prend aussi son indépendance par rapport à ça et qui est très puissante en ce moment.

 

Ce sera principalement des dessins ou des illustrations à l’encre, qui représentent des femmes modernes, qui brisent un peu les images convenues et conventionnelles de la femme, qui sont représentées par des femmes pour des femmes avec de la nudité mais sans hypersexualisation, qui se donnent de plaisir, qui militent, qui combattent…

Est-ce que tu es dessinatrice de formation ?

Oui, j’ai fait plusieurs formations en fait parce que j’ai deux passions la littérature et le dessin. Ce n’est pas vraiment possible d’étudier de la théorie et de la pratique en même temps en France, donc j’ai fait l’un puis l’autre. J’ai fait une prépa d’arts aux écoles de Condé et ensuite une école de bande dessinée à Paris. Mais j’étais très jeune et c’était trop professionnalisant. Comme j’avais envie d’étudier la théorie aussi, j’ai fait une licence qui s’appelle « Lettres et Arts » à Paris-Diderot et le M1 « Lettres, Arts et pensée contemporaine ». En fait j’avais envie de politiser mes études et ce qui peut être très frustrant dans des études d’histoire de l’art ou de littérature c’est qu’on n’est pas censé prendre position. Moi comme le féminisme s’immiscait un peu partout, j’étais frustrée en rédigeant mon mémoire de ne pas pouvoir présenter une analyse sociétale des œuvres donc j’ai bifurqué sur un M2 d’ « Art et sociologie » à l’EHESS et c’est ce que je fais maintenant. Donc je fais mon mémoire et en même temps je suis illustratrice.

Et tu arrives à tout gérer ?

C’est de plus en plus difficile de gérer les deux de front en étant efficace. Le côté illustration est en train de décoller, et ça me demande de plus en plus de temps et d’énergie. Je me posais la question de faire une thèse mais je me dis que je ne vais finalement pas en faire parce que c’est deux métiers à part entière et que je pense que je vais finir par privilégier le dessin. C’était possible de maintenir les deux jusque là mais comme les deux deviennent de plus en plus professionnels, cela devient vraiment compliqué.

Quand est-ce que t’as commencé à dessiner sur le féminisme ?

Presque tout de suite en fait, quand j’ai créé ma page Facebook puis ma page Instagram. Au départ c’était des petits contenus plutôt humoristiques puis c’est devenu franchement militant, parce que j’ai ça en moi et c’est des choses sur lesquelles j’ai envie de sensibiliser les gens.

Est-ce que le fait que ce soit un dessin permet de mieux faire passer le contenu ?

Déjà je trouve que c’est très efficace, quand on agence correctement une image, avec un texte percutant, ça se partage très rapidement, un peu comme les publicités efficaces parce qu’elles ont une bonne punchline. C’est aussi ce que je sais faire de mieux, dessiner du coup j’essaie de mettre cet atout là au service de mes idées.

Ton public est-il plus militant maintenant ?

Mon public s’est beaucoup militantisé parce que je sais qu’il est très associé aux collages, qu’il y a une grosse communauté de personnes qui collent ou qui soutiennent les collages, qui sont les régulières de mon compte, dont je pense qu’elles seront au rendez-vous à mon expo. Et avant cela je pense que c’était des personnes intéressées par la cause mais qui ne sortiront pas vraiment dans la rue. C’est majoritairement des femmes, et certains hommes qui me soutiennent en acceptant l’idée de se remettre en question. Bien que parfois il y ait aussi des incursions d’hommes pour critiquer certains posts par exemple, comme celui sur la crédibilité accordée aux hommes ou aux femmes.

Est-ce que tu as l’impression que c’est avec des dessins comme les réinterprétations de tes Vénus que tu as réussi à allier tes études en histoire de l’Art et ton art ?

Oui je pense. Effectivement, quand on étudie l’histoire de l’art, c’est toujours un même type d’œuvres pas du tout contemporaines qu’il faudrait adapter. Donc c’était assez rigolo de prendre ces images anciennes, qu’il faudrait dépoussiérer pour les remettre au goût du jour. Donc oui ça fait la passerelle entre mes domaines d’études, et à chaque fois dans les posts je présente l’image originale et ma version pour les faire connaître. Certaines des Venus que j’ai prise sont déjà des réinterprétations de Venus antiques avec par exemple une perruque Marie-Antoinette, donc finalement c’était logique de les remettre au goût du jour.C’est ton lancement cette exposition ?

 

La Bande-dessinée c’est ta passion depuis toute petite, tu lisais (et tu lis) quel type de Bandes-dessinées ?

Mon père a une très grande collection, donc je lisais tout ce qu’il lisait : Loisel, Sfar … Je n’ai pas trop eu l’école franco-belge. En fait j’aime bien les BDs un peu artsy, qui prennent des risques, qui ont des partis pris de couleurs pas évidents, des romans graphiques aussi. A l’adolescence j’ai eu une grande période manga, ce qui est une forme de Bande-dessinée aussi. Après le bac, j’ai fait un retour vers la BD parce que c’est ce que je me mettais à étudier.

Donc la Bande-dessinée et le féminisme, c’est ta vocation depuis toute petite ?

Oui complètement, mais c’est aussi pour ça que j’ai du mal à faire des contenus consensuels, j’aime bien pointer ce qui ne va pas, avec un contenu plus engagé, mais c’est un parti pris. C’est aussi pour ça qu’Instagram me censure de temps en temps.

 

C’est ton lancement cette exposition ?

Oui, c’est une exposition vente donc c’est mon lancement en tant qu’illustratrice et j’espère que ça va marcher ! Après le vernissage du 5 mars de 19h à minuit, l’exposition restera dix jours jusqu’au 14 mars.

Pour aller au vernissage :

La Sister’s Factory
43 rue de l’arbre sec
75001 PARIS

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