La Renaissance du Musée Carnavalet

Situé au coeur du Marais, après quatre années de travaux de restauration, le plus ancien musée de la Ville de Paris rouvre ses portes le 29 mai 2021, dévoilant une nouvelle scénographie pour la collection permanente. Le musée accueillera dès l’été 2021 un restaurant au sein de sa cour, et présentera le 15 décembre prochain une exposition sur Marcel Proust, « Un Roman Parisien ».

Un Hôtel Renaissance de renom :

Ce chef d’oeuvre de l’architecture Renaissance tire son appellation d’une légère déformation du nom de sa propriétaire, une certaine madame de Kernevenoy, veuve du précepteur du duc d’Anjou, le futur Henri III. Dès 1654, François Mansart aménagea les deux ailes ainsi que la façade pour l’intendant Claude de Boylesve, impliqué dans les malversations de Fouquet, l’intendant des finances du roi, qui fut contraint de le quitter en 1662. D’Illustres, personnages ont fréquenté ces lieux ; nous pourrions citer entre autres Madame de Sévigné, femme de lettres, occupa les lieux entre 1677 à 1696, ce fut entre ces murs qu’elle rédigea les lettres qui firent sa renommée. Son bureau, que l’on peut découvrir en ces murs, évoque sa passion pour l’écriture, tout en constituant un témoignage des échanges artistiques entre l’Extrême-Orient et l’Europe au 17e siècle.

La salle de bal Wendel, un décor datant de 1925, réalisé par à l’aide de techniques picturales hors du commun par le peintre José Maria Sert Y Badia, l’un des artistes les plus prisés des Années Folles. Ce décor monumental a été acquis en 1981 lors de la vente de l’hôtel particulier par la famille De Wendel, et remonté au musée Carnavalet par la suite. photographie par Cyrille Weiner

Pensé comme un voyage authentique dans le passé et le présent de Paris, le nouveau parcours, construit selon un fil chronologique continu, dévoile les trésors historiques de la Préhistoire à nos jours.

Le nouveau musée offre à son public une découverte attractive de Paris, dans le temps comme dans l’espace. Les majeures motivations sont la mise en valeur du patrimoine architectural, la volonté de proposer une redécouverte des collections permanentes selon un fil chronologique une médiation renforcée, jalonnée de nombreuses maquettes, et une numérisation innovante. Ces maquettes ne se contentent pas de représenter le lieu, elles mettent aussi l’accent sur l’événement en train de se produire : nous pourrions citer la maquette de l’Hôtel de Ville lors du dernier jour de la révolution de juillet 1830. Cette visite est ainsi rendue remarquable, rythmée par la présence de cartels réalisés par et pour des enfants réalisés des écoles, et par des élèves autistes : les œuvres sont accrochées à hauteur d’enfant. Ce renouvellement permet de dissoudre les critiques qui décrivaient ce musée comme un lieu « labyrinthique », complexe. Le musée Carnavalet est à présent résolument ancré dans le XXIe siècle. La restauration d’envergure est enrichie de nouvelles acquisitions et de généreuses donations : la donation Seligman. Le musée mènera par la suite une politique d’expositions temporaires qui viendront s’ajouter à la collection permanente, pour s’inscrire dans une évolution dynamique et s’adapter aux attentes du public, dévoilant de nouvelles oeuvres jusqu’alors conservées dans les réserves. La lumière naturelle pénètre les couloirs et les pièces grâce à cette nouvelle composition de l’espace, certaines lucarnes étaient alors occultées.

 Il est primordial d’ajouter que la totalité des œuvres présentées selon le nouveau système d’accrochage a fait l’objet d’une restauration, faisant appel à plus d’une centaine de jeunes professionnels de la restauration ainsi que d’architectes. Il s’agissait de permettre l‘intervention de jeunes étudiants, afin de parfaire leur apprentissage sur ce chantier novateur. Des espaces de consultation réservés aux chercheurs, s’accompagnant d’ateliers pédagogiques permettent de rendre plus ludique, accessible le patrimoine historique qu’abrite le lieu.

La présentation de la maquette de l’île de la Cité, en 1527, Jean-Baptiste Gurliat, photographie par Cyrille Weiner

Ce musée est un lieu exceptionnel par la remarquable diversité de ses collections permanentes, présentant toutes les évolutions successives de la ville. Malgré l’entreprise ambitieuse que constitue le projet de présenter en un parcours d’une heure trente l’évolution de la capitale de la Préhistoire à l’époque moderne, la variété des médiums, les anecdotes, les thématiques et les dispositifs adaptés à tous les publics, permettent un intérêt sans cesse renouvelé, et interpelle le spectateur. La visite débute par la salle aux enseignes des commerçants, plongeant le spectateur intrigué dans une atmosphère pittoresque, une reconstitution des ruelles de la capitale, avec d’un point de vue muséographique, un accrochage conforme à celui de 1914. Le musée met en valeur de la municipalité et sa représentation à travers les âges, les bustes des différents maires de Paris, les symboles fondateurs, la devise « Fluctuât NEC Mergitur » ainsi que son institution principale, l’Hôtel de Ville.
Le Musée s’enrichit d’une nouvelle période de l’Histoire, la Renaissance.  Ces salles d’introduction permettent au public d’établir des repères, et des liens, à l’image d’un prologue.

« Le percement de l’avenue de l’Opéra » par Marville Charles, ou Paris photographié au temps d’Haussman

Le musée présente des salons qui constituent des décors immersifs : la salle de Bal Wendel qui s’accompagne d’une représentation biblique du cortège de la reine de Saba, la chambre de Marcel Proust, le salon art déco qui éblouira le spectateur, l’amenant à découvrir sous un œil nouveau le Paris de la Belle Époque. Ainsi, les salles se succèdent, ornées de décors issus du Café de Paris de l’avenue de l’Opéra, et de la fameuse bijouterie Fouquet, emblème du développement du style Art Nouveau, incarné en l’artiste Alfons Mucha en 1901.


La chambre Marcel Proust, rassemblant les objets emblématiques, essentiels à la création : son lit, son manteau, dans lequel il s’enveloppait, ses effets personnels, conformes aux descriptions de ses amis, tels que Cocteau. A ce décor s’ajoute la méridienne, depuis laquelle l’auteur écoutait les musiciens qu’il faisait venir afin de le divertir. Le réaménagement de l’espace a été conçu grâce à l’aimable participation de la Société des Amis de Marcel Proust. Afin de permettre une immersion plus complète dans l’univers de l’auteur, une projection de photographies, et la lecture radiophonique d’extraits de la Recherche accompagnent le public.

Cependant, s’il présente des objets insolites, inattendus, le musée Carnavalet présente également des figures illustres qui ont forgé la légende de la capitale : les grands révolutionnaires tels que Marat. Les poignées de porte de la salle de bain, lieu du crime, ont été conservées ; ces souvenirs sont en liens étroits avec un certain culte des martyrs révolutionnaires, comme pendant du culte royaliste.

‘La mort de Marat », martyr de la Révolution assassiné le 13 juillet 1793 par Charlotte Corday, représenté dans ce tableau de David : Marat agonisant dans sa baignoire, avec son encrier, avec son encrier, et son billet rédigé, la composition qui juxtapose des symboles puissants en fait un martyr de la Révolution.

Cependant, les commissaires d’exposition n’omettent pas la présence des grandes figures féminines telles que Sainte-Geneviève, la sainte patronne de la ville, Louise Michel, à laquelle rend hommage le tableau spectaculaire montrant son retour de l’exil. Des lieux mythiques de Montmartre, tels que le Cabaret du Chat Noir, derrière le Musée de Montmartre, ou le Café du Rat Mort, le Bateau Lavoir, l’atelier de Picasso. La dernière partie du musée montre l’accélération et les reconstructions d’envergure qui se poursuivent, la dernière section du musée aborde aussi des problèmes environnements que poseront l‘urbanisme à l’avenir, ainsi que les événements qu’ont traversé les Parisiens récemment : les attentats de 2015, l’incendie de la cathédrale ainsi que la Pandémie.

Le Musée Carnavalet est un lieu merveilleux, destiné à tous types de publics, de par la richesse de ses collections, il serait même judicieux de le découvrir en plusieurs étapes, en plusieurs jours, pour en percevoir toutes les subtilités et tous les aspects. La circulation est rendue fluide, agréable et la médiation enrichie par les dispositifs numériques : entretiens enregistrés, écrans interactifs, témoignages. L’accent mis sur la proximité des œuvres rend ce lieu particulièrement agréable à découvrir.

olga kolobov
olga kolobov

Étudiante à l’École du Louvre en art contemporain

sources : https://www.carnavalet.paris.fr

https://histoire-image.org/de/etudes/marat-martyr-revolution,

Jean-Claude BONNET (dir.), La Mort de Marat, Paris, Flammarion, 1986

Le mobilier du musée Carnavelet, Anne Foray-Carlier, Editions Faton Mai 2000 

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