Le mythe diluvien dans le monde

L’eau est un élément primordial, nous le retrouvons partout et quotidiennement. Le thème de l’eau peut être difficile à aborder car il a plusieurs significations symboliques, elle est à la fois : une source de vie et de source de destruction, l’eau donne naissance et peut également engloutir ; un moyen de purification et de guérison comme l’eau bénite et les sources bienfaitrices et protectrices ; offre une régénérescence comme l’acte du baptême qui symbolise à la fois la mort par l’immersion et la renaissance.

C’est l’aspect de la destruction que nous allons aborder, à travers le mythe diluvien.

Le mythe diluvien ou Déluge est une inondation cataclysmique de toute la surface de la terre. Ce cataclysme est souvent orchestré par un être supérieur pour “laver” la terre des hommes corrompus pour faire table rase du passé. Le premier Déluge qui nous vient à l’esprit est celui de la Bible, avec l’Arche de Noé, un thème souvent repris dans les arts plastiques à l’instar de l’œuvre d’Edward Hicks, Noah’s Ark (1846) ou dans le cinéma avec le film Noé (2014).

Néanmoins, le Déluge n’est pas propre à la Bible mais il est présent dans les mythes et légendes des autres civilisations du monde.

Nous allons partir dans un tour du monde (non pas en 80 jours) mais à l’exploration des mythes diluviens dans le monde. PS : il s’agit d’une liste de mythes non exhaustive.

L’Arche de Noé

Dans le récit biblique, le cataclysme est déclenché par Dieu, lorsqu’il juge que les hommes sont corrompus à l’exception d’une famille, celle de Noé.

Il lui ordonne de construire une arche et de rassembler un couple de chaque espèce animale pour les préserver ainsi que sa famille de la grande inondation qui se produira pendant 40 jours et 40 nuits pour ravager tout ce qui a sur terre.

Dans le Coran, l’histoire est similaire mais présente des différences, comme la qualification de l’arche où on parle plus d’une embarcation qu’une arche. Le Déluge n’est quant à lui pas universel mais se déverse uniquement sur la population où vivent Noé et sa famille. De plus, la notion de déluge est quant à elle absente dans le récit coranique, l’événement est plus décrit comme une inondation.

La mort d’Ymir ou le déluge lituanien

Dans la mythologie scandinave, le Déluge est provoqué par la mort d’Ymir, il est le premier des géants et fondateur de cette race. Sa mort est entraînée par Odin, jugeant alors Ymir trop brutal. Par ce fait, Odin décide avec ses fils de le tuer. De son sang inonda Jötunheimr (le monde des géants) noyant alors toute la race des géants à l’exception de Belgemir et son épouse.

Le corps d’Ymir est emmené par Odin au gouffre du Ginnungagap, de son corps sans vie il crée le monde des hommes, Midgard.

Le déluge lituanien présente des similitudes avec celui scandinave. Le dieu Prakorimas lâche le déluge pour exterminer la race des géants, à l’exception d’un couple de géants qui a pour mission de repeupler la terre d’hommes et de femmes. Ici, le Déluge n’apporte pas la création d’un nouveau monde mais de la naissance de l’humanité.

Manu et Matsya, le déluge hindou

Dans la mythologie hindoue, le mythe diluvien se présente à travers le Pralaya. En sanskrit, le terme Pralaya signifie “dissolution” ou “destruction”.

Le fond du mythe rappelle celui du récit biblique. En effet Manu, le premier homme, rencontre un poisson : Matsya. Ce dernier lui demande son aide et sa protection et en échange, il l’avertit d’un déluge imminent, qui engloutira toute la terre, et le conseille de construire un bateau pour s’y réfugier avec des animaux, des graines et les sept Grand Anciens

Malgré tout, les flots deviennent agités et menacent le bateau de chavirer. C’est alors que Matsya se manifeste de nouveau sous la forme d’un poisson géant pour aider Manu en lui conseillant d’amarrer le bateau au sommet d’une montagne pour attendre la décrue. Avant de partir, Matsya lui révèle qu’il est un avatar du dieu Vishnou.

Nuwa et le Déluge chinois

Nuwa est la déesse créatrice, elle a une apparence mi-humaine et mi-serpent et forme un couple avec son frère Fuxi. Elle est à l’origine de l’humanité, en façonnant les hommes avec de la glaise.

Dans la mythologie chinoise, le Déluge est provoqué par le combat entre Gonggong et Zhurong, leur conflit provoque l’effondrement des piliers qui soutiennent le ciel, laissant la rivière s’écouler et inonder la Terre. Nuwa affligée, décide de colmater le ciel pour sauver l’humanité.

La légende des soleils

Dans la mythologie aztèque, il y a la légende des soleils, un mythe cosmogonique, qui explique la création et la destruction de plusieurs mondes successifs. Selon le Codex Vaticanus A, il se serait succédé cinq mondes, chacun gouverné par un soleil.

Ces soleils sont créés par les quatre dieux primordiaux de la mythologie aztèque : Tlaloc, Tezcatlipoca, Quetzalcoatl et Chalchiuhtlicue ; qui peuvent varier selon les versions du mythe.

Le soleil qui nous intéresse ici est le quatrième, dit Atonatuih (Soleil d’eau), créé par Tlaloc, dieu de la pluie, ou bien par Chalchiuhtlicue, déesse de l’eau vive, des rivières et des océans. Suivant la divinité à l’origine du soleil, la version du mythe diffère mais la finalité reste la même. Une pluie sans fin s’abat et recouvre toute la terre, noyant tous les hommes et seuls les poissons survécurent. Une autre version raconte que les hommes pour survivre se transforment en poisson.

Les hommes de bois dans la mythologie maya

Le popol Vuh est un texte historique écrit à l’époque coloniale et qui recense les mythes de la civilisation maya. C’est l’un des rares documents que nous disposons sur la civilisation maya. D’après lui, les dieux ont dû s’y prendre à trois fois pour créer l’humanité.

Les premiers sont les hommes de boue mais ils étaient incapables de parler et une fois la boue sèche, ils tombèrent en poussière. La deuxième race est les hommes de bois, ils étaient incapables de bouger mais étaient dotés de parole ; cependant les dieux les jugent imparfait et les font disparaître par un déluge. La troisième est celle dont nous descendrons, la race des hommes de maïs.

Tiddalik la Grenouille et le déluge aborigène

Le mythe diluvien aborigène est provoqué par un fou rire. Selon le mythe, Tiddalik, la grenouille, se réveilla avec une soif inexorable/implacable et bu toute l’eau de la terre. Le monde devenant aride où toute vie ne peut survivre, les animaux manigance un stratagème contre Tiddalik pour libérer toute l’eau, en la faisant rire. Chacun à son tour les animaux se bidonnent devant la grenouille pour la faire rire. Mais Tiddalik reste de marbre face à leur bouffonnerie. Enfin, vient le tour de l’anguille qui se tord et se détord tout simplement et provoque à Tiddalik une hilarité mystérieuse. Les eaux sortent alors de la gueule de la grenouille et provoque le déluge sur terre. 

Lone Man et le déluge amériendien

Chez la tribu des Mandans, le mythe diluvien part de la victoire de Lone Man et le Premier Créateur sur le démon Maninga. Ce dernier revient sur terre sous la forme d’une grande inondation.

Lone Man pour sauver le peuple Mandans, il construit le Grand Canoë et vainc de nouveau Maninga à l’aide de la magie de son tambour. Les eaux se retirèrent suite à la défaite de Maninga.

Gilgamesh et le Déluge

Dans l’épopée de Gilgamesh, on fait référence à un Déluge. Uta-napishti raconte à Gilgamesh l’histoire du Déluge et comment il a survécu au cataclysme. Le Déluge est déclenché par le dieu du vent : Enlil, pour ravager et supprimer les hommes.

Le dieu Ea ou Enki averti Uta-napishti, roi de Shuruppak, de l’imminence d’un déluge et lui demande de construire un bateau pour qu’il y embarque lui et sa famille et un couple de chaque animal.

Un Déluge chez les Mazdéens ?

Chez les Mazdéens, le Déluge n’est pas qu’une grande inondation mais une série de catastrophes climatiques : c’est le démon au nom de Mahrkusha au dessein malfaisant qui sème sur terre des inondations, de terrible sécheresse et un long hiver qui dure 7 ans. Le dieu Ahura Mazda pour contrer le démon, informe Yima des catastrophes qui approchent. Il lui ordonne de construire un espace souterrain pour s’y réfugier avec une poignée de bons hommes et différentes espèces animales et végétales.

Certains de ces mythes sont comparables entre eux mais d’autres s’en éloignent. Peut-on alors se demander si ces civilisations ont vécu le même cataclysme et ou bien est-ce un conte qui a voyagé de civilisation en civilisation et chacun l’a remanié en lien avec leur croyance. Mais une question reste à être élucidée, pourquoi l’Afrique, berceau de l’humanité, ne compte aucun mythe diluvien ?

Aurélie PUBERT

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